Portrait de la jeune fille en feu  : de l’art à l’amour

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Une peinture peut-elle représenter ce que l’on ne voit pas ? C’est la question que pose le film Portrait de la jeune fille en feu. Après un César pour le scénario de Ma vie de Courgette (1). Céline Sciamma (2) revient avec un film mêlant art et sentiments.

Sur une île bretonne bordée de falaises, Marianne est chargée de peindre le portrait d’Héloïse, une jeune femme sur le point de partir à Milan pour s’y marier. Mais cette dernière n’en a aucune envie, et refuse de poser en guise de résistance. Sa mère, qui a décidé du mariage, demande à Marianne de la peindre sans qu’elle ne s’en aperçoive. L’observation commence alors, basculant doucement dans de l’admiration : les regards portés sur Héloïse les troublent l’une comme l’autre jusqu’à s’enflammer. Mais pourquoi est-il si difficile de faire naître un sourire sur la toile ?

Malgré un langage trop moderne pour l’époque, le tableau nous plonge dans le 18e siècle. Portrait de la jeune fille en feu est le souvenir d’un attachement entre le modèle et le peintre. La protagoniste découvre dès son arrivée un visage brouillé, une robe verte, sur une toile retournée qui finit au feu ; un feu allumé par leur embrasement à toutes les deux.

Le film se construit essentiellement sur le silence, ainsi que sur des séquences plutôt longues sur des regards, des gestes. Céline Sciamma présente ici la peinture comme une traduction des sentiments qu’on se refuse d’exprimer.

Il s’agit presque d’un huis clos où vivent deux femmes liées par l’art, ainsi qu’une domestique, qui se cache, elle aussi, d’une faute qu’elle a commise. Les falaises alentours agissent comme les remparts d’une relation interdite ; mais elles sont également tentatrices lorsque l’on pense à mettre fin à ses tourments, ou à ses blessures. Ces trois femmes se battent pour résister à la vie qui leur est dictée, du moins pour s’en sortir, à une époque où les chaînes sont solides.

Portrait de la jeune fille en feu nous entraîne brillamment dans le secret qui entoure un simple portrait, avec deux rôles féminins interprétés par Noémie Merlant et Adèle Haenel : elles incarnent remarquablement deux femmes marquées à vie par un amour ardent.

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