‘R.M.N’ de Cristian Mungiu

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Le septième film du cinéaste roumain Cristian Mungiu en compétition officielle au dernier Festival de Cannes, intitulé R.M.N. met en scène des conflits multiethniques dans un village en Transylvanie. Matthias quitte son emploi en Allemagne et revient dans son village natal à quelques jours de Noël. Il retrouve son fils Rudi, son père Otto, resté seul, et son ex-petite amie Csilla, qui dirige une boulangerie industrielle. Quand celle-ci décide d’employer des travailleurs sri-lankais, des passions et des conflits viennent perturber le semblant de paix dans la communauté. 

L’amour, la haine et la politique se rencontrent dans ce petit village roumain où les identités des individus ont de l’importance. D’abord des insultes, puis des menaces en ligne, et le boycott des pains fabriqués : la venue de quelques travailleurs sri-lankais déchaîne les passions au sein de cette petite communauté, et l’affaire finit par prendre une tournure dramatique et brutale. Violences physiques et verbales s’entremêlent lors de scènes intenses et mémorables.

D’une froideur glaciale, Mungiu embarque le.la spectateur.trice avec des plans séquences dans les rues du village, sur ses habitant.e.s et ses forêts. Les personnages de Mattias et Csilla sont au centre du récit. L’un a du mal avec ses difficultés familiales (son fils Rudi qui ne parle pas et son père Otto mourant) et l’autre doit gérer la situation conflictuelle à l’usine. Dans une ambiance presque surnaturelle (à l’image de la vision de Rudi devant la réalité, ou encore la scène finale avec les ours, qui paraît surgir de nulle part dans un climat de grandes tensions), R.M.N est un thriller à la fois politique et social. D’un côté, la vision de Mattias l’encourage à éduquer son fils en lui transmettant les normes et valeurs d’un homme viril, comme apprendre à se battre ; tandis que Csilia, personnage plus sensible et plus ouvert, n’hésite pas à défendre les travailleurs étrangers contre l’avis général du village. Ceux-ci sont donc deux personnages que tout oppose et dont la relation se dégrade à l’approche du climax final.   

Un élément également marquant dans le film, et cela peut surprendre, ce sont les sous-titres. Tourné en plusieurs langues, le réalisateur a choisi trois codes couleurs différents pour suivre les personnages parlant roumains, hongrois ou une autre langue (principalement allemand et anglais). Cette diversité culturelle et cette accessibilité révèlent un message politique de la part du réalisateur Cristian Mungiu, qui esquisse un portrait de son pays marqué par la méfiance de l’autre. Il l’avait déjà dépeint dans ses précédents long-métrages sous un autre angle comme 4 Mois, 3 Semaines et 2 Jours, récompensé par la Palme d’Or en 2007dans laquelle il aborde la question de l’avortement dans la Roumanie des années 80.

Parti bredouille de Cannes, R.M.N. est un film froid dans le ton et dans l’histoire, mais également une véritable analyse politique. C’est un long-métrage où le mélange entre l’intime, le social et la politique crée de la passion et mène à des comportements extrêmes.         

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