Mercredi passé, à la demande des 10 étudiants élus et de 9 membres du corps intermédiaire, l’Assemblée de l’université (AU) s’est saisie du dossier des émoluments universitaires en demandant le retrait de la mesure du rectorat et l’ouverture d’une commission visant à déterminer conjointement des solutions efficaces et adaptée. La motion présentée a été acceptée par une large majorité de l’Assemblée, reste à savoir comment le rectorat va réagir à cette prise de position. Nous rencontrons Romain Alexandre Boillat, ancien président de l’AESPRI et actuel vice-président de l’Assemblée de l’université qui répond à nos questions.
1) Une partie importante de la politique universitaire passe par L’Assemblée de l’université (AU), pourtant en tant qu’étudiant, nous en entendons rarement parler. Est-ce que cette institution est vraiment importante pour les étudiants ?
Il est vrai que le travail de l’Assemblée souffre d’un grand manque de visibilité auprès des étudiants. Elle est bien entendu d’une grande importance pour la communauté estudiantine, comme le sont tous les conseils participatifs facultaires. Néanmoins, il est capital de percevoir que l’AU n’est en aucun cas l’équivalent d’un parlement universitaire. La désignation du recteur mise à part, les pouvoirs de l’Assemblée se résument principalement à des consultations et des recommandations à destination du rectorat (art. 32 de la Loi sur l’université). Les principaux intérêts pour les étudiants sont l’accessibilité au débat universitaire et aux informations liés, ainsi que la possibilité de s’y exprimer formellement. L’importance de l’Assemblée réside donc dans la portée symbolique de ses délibérations et le rôle que peuvent y jouer les représentants du corps étudiants.
2) En tant que vice-président de l’AU, quel est ton rôle dans les discussions avec le rectorat, comme celle en cours sur les frais d’inscriptions ?
La vice-présidence ne représente pas un rôle particulier dans les discussions menées avec le rectorat. Il s’agit plus pour moi de faire un travail de consultation avec les neuf autres représentants du corps étudiants et de véhiculer leurs initiatives dans l’organisation des assemblées. Sur la question des émoluments, nous avons particulièrement travaillé sur le dialogue entre les membres du corps étudiant et intermédiaire afin de déposer une motion commune.
3) Quel était l’objectif de la motion qui a été acceptée mercredi dernier ?
Cette dernière visait à demander au rectorat le retrait de sa mesure et l’ouverture d’une commission pour établir une solution acceptable autant pour les intérêts estudiantins que rectoraux. Le problème principal, reconnu par tous les étudiants de l’Assemblée, est l’entrée en force de cette mesure sans consultation avec les représentants associatifs du corps qui finira par mettre la main à la poche.
4) Cela suffira-t-il à atténuer la position du rectorat ?
Notre motion a été acceptée par l’Assemblée avec une très large majorité de 27 contre 5. Mais comme je l’ai explicité, l’AU ne peut faire à l’égard du rectorat que des recommandations, et c’est là l’unique portée de cette motion. Il est ainsi difficile de dire si cette dernière suffira pour que le rectorat se rétracte et amorce un dialogue. Il a lui-même annoncé en séance qu’il ne comptait pas revenir sur sa décision, mais qu’il était prêt à dialoguer avec l’Assemblée. Le bureau et les différents corps vont maintenant devoir se concerter pour définir la voie à suivre en fonction des réactions du rectorat. Il est difficile de prédire les réactions de chacun pour l’instant, il va falloir attendre quelques jours pour savoir si et comment cette potentielle commission pourrait s’ouvrir.
5) Qu’en est-il de la position des représentants étudiants à l’AU aujourd’hui ?
Deux positions sont communes à l’entièreté du corps : nous ne soutenons pas la manière dont le rectorat a procédé pour mettre en place cette mesure et nous ne voulons pas d’un émolument obligatoire qui rendrait l’inscription à l’université payante pour tous les étudiants. Sur le reste, plusieurs visions coexistent parmi les élus ; certains s’opposent à dialoguer avec le rectorat tant que ce dernier n’aura pas fait marche arrière, car ils se considèrent pris en otage dans une position de force qui ne permet pas de véritable dialogue ; d’autres estiment qu’il est malgré tout souhaitable d’entamer des discussions pour tenter de corriger la mesure en place. Malgré ces divisions, tous les élus se rencontrent régulièrement pour faire le point et déterminer leurs positions communes. Il est plaisant de soulever que sur cette question, les dix représentants ont su faire la part des choses et s’unir malgré certaines divergences.
6) La CUAÉ (association faîtière et syndicat des étudiants de l’Unige) parle d’une hausse des taxes, alors que le rectorat parle d’une hausse des émoluments administratifs. De quoi parle-t-on exactement ?
Il y a là une bataille de terminologie qui n’est pas sans importance. Le rectorat justifie sa mesure en la présentant comme un ajustement des frais administratifs répondant à une augmentation de 20% du nombre d’étudiants inscrits. Cette mesure vise donc à pallier l’augmentation des charges de gestion ainsi qu’à réduire le nombre de dossiers incomplets, qui s’élève tout de même à 70%. Si tel est la motivation originelle du rectorat, nous parlons bien d’un émolument administratif et non pas d’une taxe. La différence est d’importance puisque l’émolument peut être mis en place par le rectorat de son propre chef, là ou une augmentation de la taxe nécessiterait une modification de la législation cantonale (art. 48 LU et 76 du statut).
Néanmoins, certains étudiants voient dans la décision du rectorat une volonté plus budgétaire qu’administrative ; ce qui abstraitement parlant pourrait être interprété comme une taxe. Ce qu’il est important de retenir à mon sens, c’est que cette mesure représente une augmentation du coût aux études basées sur des arguments administratifs, qui je pense pourrait être résolu autrement que par un émolument.
7) Le rectorat a annoncé en août dernier la hausse des émoluments administratifs et, pourtant, la CUAÉ n’a commencé à communiquer qu’en octobre et les représentants étudiants à l’AU semblent avoir trouvé une position unie il y a seulement deux semaines. À ton avis, pourquoi est-ce si difficile pour les étudiants de se positionner sur cet objet ?
Il y a fondamentalement des désaccords entre étudiants sur la justification de cette hausse. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’il y a là des considérations profondément politiques incluant des notions polymorphiques telles que l’égalité des chances, la mobilité sociale, l’accessibilité aux études ou encore l’excellence académique. Il est évident qu’une telle problématique engendre des désaccords de principe en fonction du degré de sympathie que chacun accorde à certaines idéologies, et c’est pour cela qu’il n’est pas toujours aisé de s’accorder sur ce genre de question. Néanmoins, comme je le soulignais plus haut, les étudiants ont sur cette question fait preuve de maturité pour établir les dénominateurs communs de leurs diverses opinions, ce qui explique le temps nécessaire à l’établissement d’une position commune.
8) Certains étudiants trouvent qu’une hausse des émoluments de 50-. pour les Suisses et de 150-. pour les étudiants étrangers par inscription ce n’est pas beaucoup, et qu’il n’y a pas lieu de protester. Il est vrai que pour un certain nombre d’étudiants ces frais supplémentaires ne sont pas insurmontables. Du coup, est-ce que cette contestation est réellement importante ?
Tout dépend de comment est-ce que l’on considère cet émolument. Il est vrai que pour le titulaire d’une maturité fédéral qui ferait un Bachelor et un Master à l’Unige, ces frais administratifs ne s’élèveraient qu’à 10.- par année, ce qui est loin d’être un drame.
Néanmoins, je pense que ce n’est pas là que réside l’importance de la question. Ce qui est pour moi réellement important, c’est d’user de mesure adaptée aux problématiques visées et de le faire en consultant les personnes concernées. Si la préoccupation est de limiter les frais de gestions et la part des dossiers incomplets, il existe alors toute une série d’autres mesures qui permettrait de ne pas faire passer l’entier des étudiants à la caisse. Nous pourrions parler d’optimisation de procédure, de clarification pratique pour les étudiants dépositaires, certains ont aussi énoncé de possibles pénalités pour les dossiers incomplets. C’est là tout le sens de notre motion qui a pour but de trouver des solutions adaptées aux problématiques soulevées dans le cadre d’un dialogue constructif.
En sommes, nous pensons qu’il est de la responsabilité d’une institution universitaire de trouver conjointement de bonnes solutions qui ne pénaliseront pas l’entier des étudiants, catégorisés d’entrée de jeu en deux groupes distincts.
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