House of Cards

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Note TOPO : 5/6

Note artistique : 4,8/6

Vos vacances sont pourries à cause d’un soleil qui ne se montre pas depuis 3 jours ? Votre virée romantique tourne à la prise de tête ? Vous avez envie de vous détendre et si possible avec autre chose que les anges de la télé réalité 5 ? Ou vous êtes tout simplement en manque depuis la fin de Games of Thrones ? Alors jetez un oeil sur The House of Cards, une série américaine sortie en février 2013 et inspirée d’une production britannique des années 1990. Une adaptation ? Quelle horreur vous allez me dire, qui plus est d’une série britannique. Et pourtant, le détour en vaut la peine.

Tout d’abord, une mise en contexte s’impose. House of Cards est un récit politique mettant en scène Frank Underwood (joué par l’excellent Kevin Spacey), un membre du congrès américain. Ce dernier souhaite qu’une chose : la vengeance. La vengeance suite à une promesse non tenue du tout nouveau président des États-Unis, qui après avoir usé d’Underwood pour se faire élire, ne lui accorde pas le poste de secrétaire d’État qu’il lui avait promis. La femme d’Underwood (jouée par Robin Wright) va elle aussi entrer dans la spirale en aidant son mari tout en essayant de faire prospérer sa propre organisation humanitaire. Maintenant venons en aux faits : Pourquoi perdre 13 heures devant un écran en plein été ?

La première raison de regarder House of Cards c’est peut être la réalisation. En effet, ce n’est pas tous les jours que le réalisateur de Fight Club et de Seven se met au petit écran. David Fincher a en effet signé les 3 premiers épisodes et a co-produit le reste de la série avec K. Spacey. L’esthétisme des plans n’a rien à envier à The Social Network ou à Zodiac. Alternance de jeux d’ombres et de lumières mettant les personnages dans de dramatiques clairs-obscures. Bien que la plupart des plans soient conventionnels et reste dans le courant du moment, c’est-à-dire une imitation de la réalisation classique dans le cinéma occidental. Les différentes mise en scènes ne sont jamais innocentes et garantissent une immersion renforcée par des décors chargés en symboles.

La seconde raison, aussi importante voir prépondérante sur la première, concerne l’audacieuse distribution artistique et le jeu d’acteurs qui en découle. Kevin Spacey dans le rôle principal est déjà à lui seul un argument. Qui est Spacey ?! Vous l’avez forcément déjà vu dans Usual Suspects, American Beauty ou L.A Confidential. Si cela ne vous dit rien sachez que Spacey joue à merveille le rôle d’un homme politique aussi machiavélique que Talleyrand et aussi arriviste que Rastignac. Il n’hésite pas à nous partager ses sombres desseins directement face caméra, brisant ainsi le quatrième mur. Je ne m’attarderais pas sur ce procédé qui peut paraître douteux, car souvent utilisé dans les mauvaises comédies. Ici cette forme d’intervention prend une toute autre dimension : plus sombre et dramatique, où un simple regard suffit pour rendre complice le spectateur. Mais Spacey n’est pas à lui tout seul House of Cards : Robin Wrights dans le rôle de sa femme a un rôle qui bien que secondaire, lui permet de développer un personnage aussi arriviste que celui d’Underwood mais plus émotionnel. Vous rappelez-vous de Robin Rights ? C’est Jenny dans Forrest Gump, mais c’est surtout Erika Berger dans Millenium.

À partir de là, cette série mérite une note artistique élevée. Mais que peut-on dire du rapport avec la science politique ? Certes nous sommes dans les arcanes du pouvoir mais cela suffit-il ? Non évidemment. House of Cards ne nous emmène pas seulement au centre des arrangements politiques mais elle nous dévoile les manières les plus sombres de les utiliser. Underwood va mettre en jeux les procédés les plus immoraux pour arriver à ses fins mais toujours de manière réaliste, en jouant sur les discussions informelles mais très codifiées et planifiées. On pensera notamment à la théorie des street level bureaucrate de Lipsky [Street-Level Bureaucracy, Dilemmas of the Individual in Public Services, 1980] lorsqu’il utilisera la marge de manoeuvre que dispose une jeune journaliste (Zoé Barnes) pour déstabiliser ses adversaires. Ou lorsque Underwood joue de ses relations dans «le business» avec Rémy Danton, un lobbyiste, pour atteindre ses objectifs on ne pourra pas s’empêcher de faire le lien avec la théorie pluraliste des groupes d’intérêts [voir notamment Grossman et Saurugger, 2006]. Bref House of Cards mérite au moins un 5 pour la note TOPO.

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