Avec l’avènement des nouvelles technologies, les champs électromagnétiques sont devenus omniprésents. Quelles conséquences pour notre santé ? Sensation de brûlure, fatigue, nausée, troubles digestifs, difficulté de concentration, perte de mémoire, vertige, migraine, palpitation, etc. Voici un bref aperçu du quotidien des électrosensibles.
Cette intolérance électromagnétique n’est pas sans rappeler l’intolérance au lactose et au gluten, notamment dans cette vision répandue de psychose collective. Notons que l’intolérance alimentaire a mis du temps à être prouvée. De plus, l’hypothèse psychologique était perçue comme une négation des troubles physiques chez les intolérants alimentaires, et c’est ce que l’on retrouve chez ceux se définissant d’électrosensibles. Aux symptômes physiques bien réels s’ajoute donc l’exposition aux jugements accusateurs.
Caractérisée par ces symptômes, l’hypersensibilité magnétique (HESM) n’est actuellement pas reconnue en tant que maladie par l’OMS. Pourtant, il existe des pays qui reconnaissent l’HESM comme maladie ou handicap, tels que la Suède, l’Allemagne ou encore l’Angleterre. En l’absence de preuves scientifiques reliant symptômes et exposition aux champs magnétiques, l’OMS préfère garder ses distances. Ne correspondant à aucun syndrome connu, l’hypersensibilité magnétique a néanmoins des similarités étonnantes avec les sensibilités chimiques multiples (SCM), soit l’exposition à des substances chimiques. Si les études menées à l’aveugle ne démontrent aucune corrélation claire entre les symptômes et l’exposition aux ondes, elles justifient ces symptômes par des motifs environnementaux ou psychiatriques[1]. C’est le cas notamment des chercheurs Cordey et Rossi[2], qui perçoivent l’apparition des symptômes comme une forme d’auto-éviction. Soit, une volonté de « reconfigurer son rapport à l’espace et ses modes de vie ». Dans une situation de souffrance sociale, le patient serait « fatigué par son être en société », et développerait des symptômes lui permettant de répondre à son besoin d’isolement.
Dominique Belpomme, considéré comme un fervent défenseur de la reconnaissance de l’HESM, parle de « déni scientifique » et critique la légitimité des études menées. En effet, les problèmes avérés de mémorisation des patients faussent les résultats, ne pouvant répondre correctement aux questionnaires. De plus, les études ne prennent pas en compte « les temps de latences, les autres paramètres environnementaux en cause et le fait qu’il s’agit de phénomènes cumulatifs »[3]. Au cours de ses recherches, le cancérologue pense avoir détecté des marqueurs sanguins chez ses patients, mais reconnaît qu’une autre cause pourrait leur être attribuée.
L’association Robin des Toits, avec pour porte-parole Etienne Cendrier, expose un autre problème dans ce débat quant à la réalité de cette pathologie. Selon l’association, les études menées sont en conflit d’intérêts avec les industriels de la téléphonie qui auraient déboursé plusieurs milliards d’investissement dans la recherche sur les risques de leurs technologies. Cendrier parle de « scandale sanitaire de la téléphonie »[4]. Théorie du complot ou sonneur d’alerte, on ne peut que lui accorder l’importance d’effectuer des recherches indépendantes.
Cette vision reprend néanmoins celle d’un chercheur spécialisé dans cette thématique, Olle Johansson, qui a vu récemment son budget retiré pour ses recherches. Il affirme dans Le Monde[5] avoir été évincé du projet Göteborg (en Suède), après avoir fait une découverte surprenante sur la spécificité des symptômes dermatologiques développés par les patients observés.
En l’absence de preuve scientifique, tout le monde semble s’accorder sur la nécessité d’appliquer le « principe de précaution » et d’appeler à la « responsabilité individuelle ». Qu’est-ce que cela signifie ? Il faut continuer les recherches scientifiques et limiter l’exposition aux champs électromagnétiques. Au quotidien, les conseils sont de limiter l’utilisation du téléphone portable (surtout pour les enfants) et de privilégier la connexion filière tant pour Internet que pour le téléphone fixe. La mobilité de la technologie apporte un confort certain mais augmente dans ce cas les risques sanitaires. Actuellement, il existe quelques zones blanches où les champs électromagnétiques de hautes fréquences sont absents ainsi que des logements spécifiques anti-allergènes, notamment à Zurich et au Québec. Ces espaces de vie créés pour les hypersensibles sont cependant dépendants de la reconnaissance du pays vis-à-vis de l’hypersensibilité magnétique.
Si le lien de causalité entre les ondes et les symptômes recensés reste incertain, la réalité de ces symptômes ne fait aucun doute au même titre que les risques cancérigènes provoqués par ces ondes. Bien que l’on parle d’une absence de preuve scientifique irréfutable, il est néanmoins démontré scientifiquement que les ondes peuvent bel et bien perturber les mécanismes biologiques humains. La preuve scientifique irréfutable est-elle nécessaire afin de reconnaître un mal-être bien réel ?
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