Les petits comptes entre amis de la CUAE

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Il y a bientôt dix ans, la CUAE avait effectué une demande de financement auprès de la CGTF pour l’impression d’affiches électorales pour la votation populaire du 21 mai 2006. Cette dernière ayant refusé la demande, la CUAE a fait opposition, puis appel devant la Commission de recours de l’Université[1]. Cet évènement est loin d’être anodin : à l’époque, la CUAE faisait assez régulièrement opposition face aux décisions de la CGTF[2]. Depuis, le syndicat étudiant a trouvé une meilleure solution : l’infiltration.

 

Avant toute chose, une petite explication s’impose. La CGTF (ou « Commission de gestion des taxes fixes ») a pour tâche de gérer la redistribution d’une partie des taxes universitaires aux associations[3]. Cette redistribution est divisée en deux catégories : les subventions ordinaires, qui consistent en un financement relatif au nombre de membres de l’association, et les subventions extraordinaires, qui sont liées à des projets spécifiques. Les subventions ordinaires sont d’un montant de base de 300 CHF, plus 5 CHF par membre de l’association ; les subventions extraordinaires, elles, dépendent évidemment du projet concerné et peuvent donc aussi bien s’élever à 182.40 CHF qu’à 28 566 CHF[4].

 

Toutes les associations ne sont pas égales concernant les subventions de la CGTF, que ce soit en raison de leur nombre de membres ou des demandes de subventions extraordinaires acceptées par la commission[5]. Néanmoins, une association touche très nettement plus que les autres : la CUAE.

 

Sur l’année 2013-2014, la CUAE a touché 24 195 CHF[6] de subventions ordinaires. En effet, à chaque fois qu’une personne s’inscrit à une association, elle offre 5 CHF à son association… et la même somme à la faîtière dont est membre l’association ; la faîtière touche en outre 2000 CHF de base, quel que soit son nombre de membres. Or, les associations ayant accès à un nombre d’étudiants limité, cette répartition égale des subventions crée de fortes différences. Ainsi, si la subvention des associations d’étudiants varie de 450 (pour l’association des étudiants en histoire économique) à 4 555 CHF (pour l’association des étudiants en droit), la CUAE a touché, pour l’année académique 2013-2014, davantage que le cumul des sommes perçues par les quatorze autres associations étudiantes ayant bénéficié d’une subvention ordinaire cette année-là. La CUAE ne redistribuant pas l’argent ainsi perçu à d’autres associations de l’Université de Genève, il est légitime de se demander s’il est véritablement justifié qu’une association touche davantage que toutes les autres réunies. Ce d’autant plus que certaines associations ont parfois des finances très réduites, en raison du petit nombre de membres qu’ils peuvent obtenir, alors que la CUAE n’a, en théorie, pas d’autre limite que le nombre total des étudiants de l’Université de Genève. Cette répartition égale entre association et faîtière pose donc plusieurs problèmes aux plus petites associations, qui sont parfois contraintes de limiter leurs projets à ce motif, alors que, dans le même temps, le syndicat étudiant dispose de beaucoup plus d’aisance sur le plan financier.

 

Néanmoins, le constat ne s’arrête pas là. La CUAE est également l’association ayant touché le plus d’argent en subventions extraordinaires durant l’année académique : 30 499.45 CHF, soit 21% de la somme totale distribuée en subventions extraordinaires cette année-là. Pour comparaison, la deuxième association ayant perçu le plus d’argent, l’AESPRI, a touché 13 629 CHF, soit plus de deux fois moins. En outre, il faut aussi souligner que la Cigüe a touché, en 2013-2014, 23 640 CHF de subventions extraordinaires, dans le but de « particip[er] au paiement des salaires pour l’année 2012-2013 »[8]. Or, la Cigüe est une coopérative de logement[9] dont le président actuel se nomme Ignace Cuttat, ancien secrétaire permanent de la CUAE et de la CGTF.

 

Comment expliquer que la CUAE ait reçu autant d’argent ? Il est possible de se dire que ces financements étaient tous justifiés. Toutefois, la composition de la CGTF interroge. En effet, la commission se compose au total de six membres : trois membres étudiants et un membre assistant, qui prennent les décisions, plus un membre issu du Rectorat, disposant d’une voix consultative, et un secrétaire, qui ne vote pas, mais participe aux discussions concernant les demandes. De ces six membres, quatre sont bénévoles et deux sont rémunérés : le secrétaire, rémunéré à hauteur de 40%, et le président (désigné par la commission entre les quatre personnes disposant d’un droit de vote), défrayé à hauteur de 10%. Au total, ces deux salaires ont représenté 39 630.30 CHF pour l’année académique 2013-2014. Or, cette année-là, la présidente et la secrétaire de la CGTF[10] étaient toutes deux membres du comité de la CUAE. Il est donc légitime de se demander si cette double appartenance n’a pas affecté la répartition des fonds[11]. De plus, quand on ajoute les trois secrétaires permanents de la CUAE, rémunérés à hauteur de 40%[12] par un fonds lui aussi prélevé sur les taxes fixes, mais ne dépendant pas directement de la CGTF, la CUAE et ses membres du comité – passés ou actuels – ont perçu au total 197 964.75 CHF provenant des taxes fixes durant l’année académique 2013-2014. En faisant abstraction des salaires des secrétaires permanents de la CUAE (qui ne passent pas directement par la CGTF), cette seule association a reçu 52% du budget annuel de la CGTF.

 

Si le syndicat étudiant peut exercer ce contrôle sur la commission de gestion des taxes fixes, c’est parce que les membres de cette dernière sont désignés par l’Assemblée de l’Université. Or, depuis la mise en place d’élections interfacultaires pour cet organe en 2011, la CUAE a présenté à chaque élection une « liste des associations », qui officiellement coordonnait les associations de l’Université, mais servait officieusement à garantir le contrôle de la CUAE sur cette instance. Jugez plutôt : de 2011 à 2013, le président de l’Assemblée de l’Université était Ignace Cuttat[13], alors secrétaire de la CGTF et ancien secrétaire permanent de la CUAE. En 2013, sur les sept élus de la « liste des associations », trois appartenaient au comité de la CUAE, dont deux secrétaires permanents[14]. En 2015, la charte qu’ont dû signer les candidats de la « liste des associations » précisait qu’au moins un secrétaire de la CUAE devait siéger au sein de l’Assemblée de l’Université[15]. En somme, si cette liste émanait théoriquement de plusieurs associations différentes, la CUAE a, dans les faits, toujours eu la prééminence, ce qui lui a offert une représentation importante au sein de l’Assemblée de l’Université et lui a permis de choisir les personnes nommées pour la CGTF.

 

Les choses vont peut-être évoluer lors de la prochaine législature, puisque la liste des associations n’a obtenu que cinq sièges sur dix, ce qui ne lui offre donc pas la majorité des voix étudiantes au sein de cette instance. Avec une répartition plus équilibrée, il est possible que des personnes n’appartenant pas au comité de la CUAE intègrent la CGTF, rendant cette dernière plus neutre. C’est du moins la théorie, puisque le syndicat étudiant n’a semble-t-il pas renoncé à sa situation : suite à la démission d’une membre du corps intermédiaire au sein de l’Assemblée de l’Université, un certain… Ignace Cuttat[16] s’est présenté pour la remplacer. Quelque fois, rien ne semble vouloir changer.

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7 réponses à “Les petits comptes entre amis de la CUAE”

  1. Avatar de Un étudiant parmis les autres
    Un étudiant parmis les autres

    Mais quelle touche subtile ! Quel tact ! Quelle finesse ! Le nouveau responsable des Affaires Universitaires de l’AFU ouvre la voie de la collaboration à l’Université en rajoutant encore une fois de l’huile sur le feu d’un conflit ridicule ou ni les uns ni les autres ne sont capables de s’écouter ou se respecter ! Quand est ce que vos différends personnels laisseront ils leurs places à l’écoute et à la discussion ? Quand est-ce que vos égos surdimensionnés s’effaceront-ils pour qu’enfin nous puissions nous préoccuper de l’intérêt des étudiants et des associations ?

    CUAE, AFU : deux faces d’une même pièce, celle de la mauvaise foi. Vivement une faitière où les étudiants pourront se sentir représentés sans avoir à assister aux antiques rivalités d’étudiants frustrés !

  2. Avatar de Some communist guy
    Some communist guy

    Merci beaucoup pour cet article éclairant !
    Tu hais la CUAE, très bien. Tu hais la CGTF, très bien. Je retiens de ton article que les organes étudiants sont infiltrés par dr dangereux hommes barbus étrangement affiliés à toute sorte de groupuscules gauchistes. Peut-être est-ce un complot judéo-bolchévique ? L’avenir nous le dira…
    Ayant passé un certain nombre d’années à l’Université de Genève – et hors de la tryptique CGTF-CUAE-CIGUE que tu méprises tant (et à raison, ce sont des subversifs nom de bleu !), –
    j’ai eu l’occasion de remarquer que la CUAE était une association hyperactive: conférences, groupes de travail sur des questions qui ne t’intéressent sûrement pas (genre, international, logement… et j’en passe),
    permanences qui font que si le travail est théoriquement de 40 %, il est en réalité proche du double… etc.
    Autant je n’aime pas tout ce qu’ils font, autant que j’apprécie l’engagement et la constance de l’engagement chez ceux qui se mobilisent pour le bien commun.
    J’ai aussi demandé des subventions à la CGTF plusieurs fois pour une association dont le nom importe peu ici et elles nous été accordées à chaque fois. Le fait que nous ayons moins d’argent ne m’a jamais dérangé puisque nous faisons moins d’activités. Mais la logique semble dépasser l’horizon de ta pensée…

    Ils ont de l’argent ? Oui. Travaillent-ils pour cet argent ? Oui. Discussion close.
    Ils sont présents, travailleurs et ont permis un certain nombre de réalisations dans cette université
    qui ne sera égalé par des gens comme toi qu’en 2178 (et à condition que la CUAE disparaisse demain).

    Malgré tout, je salue l’effort de rédiger un article qui dénigre la CUAE. Si tu as le temps de faire des choses pareilles, tant mieux pour toi. Je remarque cependant avec un petit plaisir que tu as le temps
    de rédiger des niaiseries complotistes mais tu ne sièges pas à des commissions auxquelels tu t’es inscrit volontairement (et oui, tes frasques sortent du cadre de l’université, tu devrais t’en réjouir: TU ES UNE STAR).

    Finalement, ceci est un message pour la nouvelle faîtière. Autant je comprenais certaines des motivations qui vous ont menés à la scission, autant je suis dépassé par l’idée de confier quelconque responsabilité à ce sinistre personnage….

    A bon entendeur,

    Un homme qui va quitter le réseau Alumni en raison de son affiliation à ce genre de personnages.

  3. Avatar de Obsteny
    Obsteny

    Ah PHM, encore une autre…

    Sérieusement il me semble, je n’en suis point certains, mais la majorité des subventions touchées par la CUAE sont utilisées pour payer les agendas qui sont distribués aux Étudiants et Étudiantes de l’UNIGE et gratuitement d’ailleurs.
    Tu t’étais déjà ridiculisés il y a quelques semaines en t’opposant à la nomination de M. Cuttat à l’AU …
    la tu en rajoutes une couche… Quel triste personnage. Comme quoi il y a des choses qui ne changent jamais…

  4. Avatar de Hubert Bonisseur
    Hubert Bonisseur

    Peut-être que l’AFU, lorsque qu’elle aura un programme ainsi que de véritables projets, touchera-t-elle d’avantage de subventions ? Pour cela un responsable des Affaires Universitaires compétent et qui n’attaque pas mesquinement et ouvertement deux des associations les plus actives de l’UNIGE est à mon avis nécessaire. L’année prochaine peut-être ?

  5. Avatar de Alain Rem
    Alain Rem

    Scandaleux que l’univesité laisse passer de telles magouilles et que la prétendue faitière des associations les vole de la sorte.

  6. Avatar de cumulard
    cumulard

    PHM a été membre de l’AEFRAM, de l’AEHG, secrétaire de l’AEL et rédacteur en chef de REEL, où il a pu laisser libre cours à son doux penchant pour le totalitarisme orwellien. Il a été membre du conseil participatif de la faculté des lettres et est toujours membre de sa commission des études (ce qui lui permet de siéger aux côtés d’un certain Ignace Cuttat dont il semble faire grand cas). Ce n’est que grâce à la lucidité des électeur-trice-s étudiant-e-s que sa présence à l’Assemblée de l’Université nous a été épargnée malgré de multiples candidatures. Il complète également son CV en occupant différents postes à l’AFU, se faisant habilement passer pour un étudiant en histoire de l’art pour que sa candidature au bureau puisse être soutenue par l’association concernée.

    Aujourd’hui, il a découvert l’eau chaude et le fait que les étudiant-e-s investi-e-s dans les associations ou la politique universitaires sont relativement peu nombreux et qu’on risquait de retrouver une même personne à différentes fonctions… comme lui.

    Il semble que l’introspection ne soit décidément pas le fort de ce jeune homme… Et la frustration de voir que quelques postes lui échappent encore paraît être sa motivation principale.

  7. Avatar de Emma
    Emma

    Quel article chiant !!!

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