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Face à face : Initiative sur les familles

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screen-captureT.O.P.O. a interrogé deux jeunes politiciens sur cet objet. Victor Braune, membre du comité des Jeunes PLR Suisse et opposant à l’initiative et Xavier Schwitzguébel, président des Jeunes UDC Genève et favorable à l’initiative ont répondu à 5 questions. 

L’adhésion/le refus d’une telle proposition implique une certaine vision du rôle de l’Etat. Quelles sont pour vous les différentes conceptions que ce thème mobilise ?

Xavier Schwitzguébel :

L’UDC est un parti patriote-conservateur qui aspire à une vision libertaire de la société. Nous considérons donc que la société civile supplante l’État et que la famille est à la base de tout.  C’est donc aux familles de décider du mode d’éducation de leurs enfants sans que l’État ne s’immisce dans ce choix privé.

Victor Braune :

La famille est un sujet très politisé et sensible en Suisse. Certes, l’Etat doit aider les familles afin de garantir à celles-ci de quoi élever dans la dignité leurs enfants. Il doit également tout mettre en œuvre, comme le défend depuis longtemps le PLR, pour permettre aux familles de concilier la vie familiale et professionnelle. Ce d’autant plus que le coût de la vie oblige aujourd’hui une grande partie des familles d’avoir deux parents qui travaillent, même à temps partiel. L’Etat ne doit par contre aucunement favoriser un système familial vis-à-vis d’un autre. Il doit offrir le plus de liberté et d’égalité possible aux parents dans l’organisation de leur vie familiale, et ce sans les inciter à choisir un modèle plutôt qu’un autre par des incitations pécuniaires ou fiscales. Les aides aux familles doivent de plus être égales pour tous et ne pas favoriser une classe sociale plutôt qu’une autre. La présente initiative est contraire à l’ensemble des principes essentiels que je viens d’évoquer.

Cette initiative semble vouloir élargir le champ d’exercice de la liberté individuelle aux frais de l’Etat via des déductions fiscales pour des familles qui choisissent de garder les enfants en bas âge à la maison, que pensez-vous de cela ?

Victor Braune : 

L’initiative part d’une bonne idée : en tant que libéral je défends un Etat svelte qui pèse le moins possible sur les citoyens. En cela les déductions fiscales représentent une bien meilleure solution que les subventions. Elle est toutefois dangereuse car elle met en danger le système des déductions fiscales en ce sens qu’elle permet aux familles gardant les enfants à la maison de déduire des frais qui n’existent pas! Nous avons soutenu d’importantes déductions pour les familles ayant des frais de garde en plaçant leurs enfants dans des lieux d’accueil car précisément cela occasionne des dépenses importantes pour celles-ci. Un homme ou une femme qui garde ses enfants à la maison n’effectue pas de dépenses importantes. Seul un système logique peut réellement être efficace et démocratique.

Xavier Schwitzguébel :

Ce n’est pas aux frais de l’État, mais aux frais des familles. Aujourd’hui une famille qui éduque seule ses enfants doit: 1payer l’éducation à la maison, 2 assumer moins de rentrées financières, 3 payer par les impôts les crèches des autres familles, 4 elles ne peuvent pas déduire les frais de garde comme les autres familles. Elles sont donc 4 fois perdantes, mais elles le font pour le bien de leurs enfants. Il est donc légitime de donner la possibilité d’au moins déduire le coût des gardes gérées par la famille.

Comment justifier cette mesure qui de facto promeut un traitement inégal des familles en favorisant un modèle ‘unique’?

Xavier Schwitzguébel :

Votre question est partiale. En réalité elle ne « promeut » pas « un traitement inégal », mais elle donne la possibilité à des familles de la classe moyenne aux petits revenus de garder seules leurs enfants du fait des économies fiscales engendrées.

Victor Braune : 

Ce modèle est totalement injustifiable. C’est la liberté individuelle des familles garantie par la Constitution qui est ici menacée par un Etat qui imposerait un modèle plutôt qu’un autre. Celui-ci se doit au contraire d’aider l’ensemble des familles, quel que soit le modèle choisi. La droite conservatrice tente une nouvelle fois de tout faire en sorte pour que les femmes retournent au fourneau, ce qui est proprement scandaleux en ce 21ème siècle qui promeut la conciliation de la vie familiale et professionnelle, bien souvent nécessaire. C’est un libre choix des parents de s’organiser de cette manière ou non. L’introduction d’une promotion consciente de modèles « à suivre » serait un précédent extrêmement dangereux dans notre Etat libéral et démocratique. Il s’agit donc d’une logique non seulement injustifiable, mais également dangereuse car contraire à nos principes.

Qui serait le plus impacté par cette initiative ?

Victor Braune : 

En cas d’acceptation de cette initiative, c’est l’ensemble de la population qui devrait passer à la caisse. Ces déductions fiscales injustifiées causeraient des pertes de rentrées fiscales importantes, qui devraient être compensées par une montée des impôts qui pèserait sur l’ensemble des contribuables. Cela ne remet aucunement en question le principe des déductions fiscales car celles-ci sont nécessaires pour soutenir les familles. Elles poussent de plus l’Etat à réduire ses dépenses inutiles et à fonctionner avec efficacité afin de permettre celles-ci. Une « sur-déduction » à tout-va et sans fondement toutefois viderait en partie les caisses de l’Etat. Ce manque à gagner devra être compensé afin de les combler. Finalement l’initiative favoriserait une minorité de familles sur le dos de l’ensemble des contribuables.

Xavier Schwitzguébel : 

D’un côté les familles aux petits revenus qui pourront mettre du beurre dans les épinards tout en éduquant mieux leurs enfants. De l’autre côté notre État providence obèse sera forcé d’exercer une salubre cure et de revenir à l’essentiel en coupant une partie du superflus.

Si vous deviez résumer pourquoi voter pour/contre l’initiative sur la famille…

Xavier Schwitzguébel : 

Voter pour notre initiative c’est donner aux familles la possibilité d’éduquer leurs enfants comme elles le veulent et de moins fiscaliser la classe moyenne. Redonnons le choix et les libertés aux citoyens, assez de cet État obèse et tentaculaire qui s’immisce dans notre sphère privée !

Victor Braune : 

L’initiative crée une dangereuse incitation et se trouve être discriminatoire et infondée. Une dangereuse incitation car l’Etat se verrait inciter un modèle en particulier au détriment de tous les autres, et ce alors que nous devons plus que jamais permettre de concilier vie professionnelle et familiale. Elle pousserait ainsi un des deux conjoints (bien souvent les femmes, surtout pour les enfants en bas âge), à sacrifier sa carrière professionnelle au détriment d’une possible conciliation. Cette logique rétrograde ne saurait exister dans notre 21ème siècle. L’initiative est infondée car elle permettrait de déduire des frais qui n’existent pas, précédent dangereux pour le système des déductions fiscales qui est hautement plébiscité. L’Etat doit aider les familles tout en garantissant une totale égalité entre modèles et une liberté de choix non influencée des parents en termes de structures familiales.

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