La guerre des faîtières ne fait que commencer

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À lire aussi : « Réaction de la CUAE sur la création d’une nouvelle faîtière » et « Les discussions autour de la faîtière : une vraie chance sous des faux airs de guerre« 

Hier soir, les associations de l’Université de Genève ont reçu un courriel qui a surpris, apeuré, attristé, réjoui, indigné, enjoué, et déçu beaucoup de gens mais pas pour les mêmes raisons. Un groupe d’associations de l’université annonce officiellement la création d’une seconde faîtière à l’Université de Genève. Cette seconde faîtière devrait porter le nom d’AFU pour Association faîtière de l’Université de Genève et s’inscrit en concurrence directe avec l’actuelle faîtière, la CUAE (Conférence universitaire des associations étudiantes). Nous avions déjà parlé de l’AFU dans un précédent article du 29 mars. Depuis, nous n’avions pas eu plus d’informations étant donné la nature discrète des négociations qui se sont déroulées à huis clos entre les membres de l’AFU et de la CUAE. Cette absence d’informations durant toute cette période a rendu la réception de ce courriel hier encore plus surprenante. Deux de nos topoïstes n’ont pas dormi de la nuit pour décrypter le rapport produit par l’AFU suite à ces négociations restreintes. Voici ce que nous en avons retenu. Pour aller plus loin, nous avons joint en fin d’article le rapport complet.

Dialogues de sourds et faux clivages ?

Si l’on regarde le résumé des débats tel qu’il est présenté par l’AFU, une chose saute aux yeux : certains points sont à la fois présentés comme des points de consensus et des points de désaccord. Par exemple, un des points de désaccord de la réunion du 15 avril concerne le comité, alors que le 23 avril ce point est noté comme un point de consensus. On peut se dire qu’une solution a été trouvée. A l’inverse, des points sont parfois d’abord notés comme faisant consensus et quelques réunions  après sont désignés comme sujet de discorde. C’est le cas de la structure à deux piliers et de la création d’un pôle sur la vie étudiante. Face à cette confusion, deux solutions sont possibles. Soit les deux parties ne dialoguaient pas réellement et débattaient dans le vide sans se comprendre. Soit il n’y a pas vraiment de point de désaccord, car des solutions ont été trouvées, mais aujourd’hui il n’est pas avantageux pour l’AFU de les mettre en avant. Allons plus en détails pour voir si ce point de vue est justifiable.

Avoir un pôle « vie étudiante » et un pôle « politique universitaire » au sein d’une même organisation

Ce point semblait être le cœur des premières négociations – lorsqu’elles étaient encore ouvertes et que Topo pouvait y participer. Durant les premières réunions, cette séparation entre vie étudiante et politique universitaire était présentée comme l’élément novateur de l’AFU. Or, d’après le rapport écrit par l’AFU elle-même, ce point aurait fait l’objet de solutions approuvées par les deux parties. La CUAE propose de se réformer en ajoutant un pôle « vie étudiante » plus important en son sein. Pourquoi cette solution n’a pas mis fin aux négociations ? Selon le rapport de l’AFU, la CUAE aurait accepté de créer un pôle « vie étudiante » mais ne voulait pas donner autant de pouvoir à cet organe (par rapport au pôle politique universitaire) que le désirait l’AFU.

La CUAE, bad boy gauchiste de l’uni ?

Un autre point ressort des négociations : les méthodes employées par la CUAE pour défendre sa ligne politique. L’AFU reproche à la faîtière d’user d’opérations coup-de-poing de manière abusive. La CUAE a démenti de manière convaincante au cours des négociations la majorité des rumeurs qui couraient à ce sujet, en l’absence de preuves du côté des accusateurs. Que cela soit justifié ou non, il est indéniable que la CUAE a une mauvaise image de manière générale. Chaque nouveau secrétaire doit porter un héritage lourd, chargé de rumeurs souvent fausses ou qui résultent des actions des précédents secrétaires. Quoi qu’il en soit, il est également vrai que certains membres de la CUAE participent à des actions politiques en leur propre nom. Ce qui malheureusement peut entrainer la confusion dans la perception de l’organisation en général. Si un-e secrétaire est dans une manifestation politique en son nom, on peut rapidement et à tort  faire l’amalgame entre sa position personnelle et celle de la CUAE.

Les associations comme membres des Assemblées Générales

Un dernier point qui émane de ces négociations concerne la réforme de l’assemblée générale de la CUAE. L’AFU a tenu une positon claire en appelant de ses vœux la présence des associations en tant que seuls membres constituant l’AG afin d’améliorer la représentativité de l’organe qui actuellement peut se réunir avec un quorum de seulement 50 étudiants (sur plus de 16 000). Avec la séparation entre pôle « politique universitaire » et pôle « vie étudiante », cette revendication semblait être une des plus importantes de l’AFU. Elle est revenue dans au moins trois négociations sur quatre et était présente dans deux des trois débats ouverts qui ont précédé ces négociations. Dans son rapport, l’AFU explique que sa principale crainte de ce quorum très faible est qu’ « il suffirait qu’une cinquantaine d’étudiants viennent à l’AG pour modifier complètement les votes et voter à l’inverse de l’intérêt de l’association et de ses membres ». Face à cela, la CUAE aurait répondu que « ce n’est jamais arrivé donc ça n’arrivera pas ». Encore une fois, face à une réponse aussi peu argumentée, deux conclusions sont possibles.

Soit les représentants de la CUAE ont un raisonnement très superficiel, soit leur propos ont été arrangés ou mal compris par l’AFU. Le résumé de ce point de négociation présenté par l’AFU est d’autant plus déstabilisant, qu’un début de consensus semblait avoir été trouvé : Une AG bicamérale avec un vote pour les associations et un vote pour les étudiants (page 5 du rapport).

Pourquoi avoir fermé les négociations ? 

En dehors de ce rapport présenté par l’AFU, un reproche majeur peut être fait à la CUAE. Pourquoi avoir accepté de fermer les négociations à un groupe restreint dès le 30 mars ? Dans un précédent article, j’avais déjà soulevé ce point en reprochant que la volonté de trouver une solution efficace, rapide et consensuelle entre l’AFU et la CUAE ne devait pas se faire au prix d’une procédure discutable d’un point de vue démocratique. La CUAE est notre association faîtière, qui nous représente démocratiquement. Néanmoins, les reproches faits par l’AFU et la volonté de débattre sur la structure même de la CUAE n’étaient-ils pas des points suffisamment importants pour être rendus publics de façon claire ? Pourquoi avoir voulu prendre en charge tout le fardeau que constituaient de telles discussions ? La conséquence est dramatique aujourd’hui : le 19 mai sera officialisée une seconde association faîtière sans que les étudiants n’aient été consultés directement, ni en amont, ni pendant les négociations, ni par la CUAE, ni par l’AFU.

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2 réponses à “La guerre des faîtières ne fait que commencer”

  1. Avatar de Gaetan Van Campenhoudt
    Gaetan Van Campenhoudt

    Remettre toute cette analyse dans le contexte des élections de l’AU, aurait été des plus pertinents non?

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